Un début catastrophique

Mardi, 13 novembre 1984.

Nous roulons depuis cinq heures maintenant, en direction de Johannesburg. Derrière nous, Le Cap et déjà mille souvenirs se baladent dans notre tête : la première émission enregistrée au bout du monde, la foule venue nous encourager, les journalistes étonnés, les cocktails très chics, les conférences en « baskets », les autorités ravies et notre troupe au pas cadencé, l’hélicoptère qui se balançait au-dessus du cap de Bonne-Espérance par un vent de 120 kilomètres à l’heure et les autruches qui, pour une fois, ne se cachaient pas la tête dans le sable, étonnées devant ce ballet de voitures rutilantes contre lesquelles Vasco de Gama aurait sans doute troqué sa coquille d’occasion.

La route est lisse, belle, droite. Une route comme nous n’en reverrons pas avant longtemps. Il faut en profiter. Le moteur rugit, les vitesses passent sans faire de bruit. A mes côtés, le cameraman Benoît Jacques achève son troisième coca tiède. Il ne dit rien, mais sous sa chevelure bouclée de jeune homme bien sage, il savoure le spectacle. Ambiance Hollywood, haleine fraîche. « Le Grand Raid, ça va décoiffer ! »

Je l’interromps dans ses songes : « Tu te rends compte, Benoît ; dans huit mois exactement, nous serons en Terre de Feu! Avec quarante-cinq mille kilomètres dans les jambes ! » Son air poli d’enfant modèle paraît s’excuser pour tant de folie.

Des voitures nous dépassent en nous saluant d’un coup de klaxon. Des têtes blondes ou noires en sortent, pour nous dispenser de chaleureux « Good Luck ! » et de souriants « Bye-Bye ! ». Certains arborent des affiches, d’autres crient ou chantent. Tous nous ont vus sur leur écran de télévision et applaudissent la caravane qui s’étire déjà aux quatre coins du pays. Il est presque vingt heures. La route s’est perdue dans le ciel devenu sombre. L’air du soir refroidit un peu l’habitacle, colportant les odeurs sans cesse renouve­lées de la nature en fête. C’est une belle journée qui s’achève. « Dans une vingtaine de kilomètres, Benoît, je te passe le volant… »

Soudain, en face de moi, des phares blancs déchirent les ténèbres. Il y en a quatre. Quatre phares aveuglants. Quelqu’un est en train de dépasser, sans rien voir. J’écrase la pédale de frein. Coups de volant à droite, à gauche, à droite. La voiture se met en travers dans un interminable dérapage.

C’est le choc, à une vitesse encore élevée.

Le véhicule d’en face percute l’avant gauche et défonce la portière. Il y a un bruit effrayant, puis le silence. Benoît a tapé contre le pare-brise. Je suis immobile. Sans dire un mot. Il y a du verre partout.

Mes mains peuvent remuer. Mes jambes aussi. C’est déjà ça… Mais la voiture, dans quel état se trouve-t-elle ! Le capot, le moteur, le châssis, la porte, les sièges, le coffre : tout est cassé ! Mon bras gauche est rouge de sang. Des dizaines de petits morceaux de verre y sont plantés. Sans doute les bouteilles Thermos qui ont éclaté.

Je n’entends plus rien. Un homme chaussé de sandalettes sort de l’autre véhicule en boitant. Son pied saigne. Nous ne savons pas trop quoi dire, ni quoi faire…

Je répète sans arrêt : « Je ne comprends rien, je ne comprends rien… Quelqu’un a doublé, n’est-ce pas ? quelqu’un a doublé ? » Benoît ne répond pas. Dans la nuit noire, nous sortons de cette carcasse, comme des automates désarticulés. Sur la portière enfoncée, il est écrit : « Le Cap-Terre de Feu » en lettres rouges. L’inscription est meurtrie, comme nos jeunes illusions…

Benoît tourne autour de la voiture, sans rien dire. Je sais qu’il ne doit pas être très content. Lui qui aime l’ordre et qui a passé de longues heures à préparer la voiture ne retrouve aucune affaire. Rien n’est à sa place. La caisse à outils est passée de l’arrière à l’avant, les vitres ont volé en éclats, la caméra a basculé. Tout cela doit le contrarier.

Pour le moment, il faut retrouver au plus vite la boîte à pharmacie, car mon bras saigne de plus en plus. Des poids lourds lancés à vive allure nous frôlent. Enfin, deux phares jaunes annoncent de l’aide : sans doute la voiture d’assistance rapide. Le mécanicien Jean-Pierre Coppens et le photographe Gauthier Fleuri en sortent rapidement. Eux aussi sont consternés, hébétés.

Immédiatement, Jean-Pierre va fouiller dans le coffre de sa voiture, en extrait un cric, un marteau et quelques clefs. Il tape et redresse dans tous les sens, sous les yeux étonnés des occupants de l’autre épave. Mais lorsque Benoît, consciencieux jusque dans la détresse, sort un groupe électrogène, déroule un câble, branche une torche électrique de mille watts, hisse sa caméra sur l’épaule et commence à filmer la réparation, les Sud-Africains ne comprennent plus rien ! Ils ouvrent de grands yeux, en avant l’air de se demander en face de qui ils se trouvent, et si tout cela n’est pas une mise en scène dont ils seraient les malheureux héros !

Gauthier prend des photos, Jean-Pierre cogne, Benoît tourne et moi, je réapprends à marcher. La voiture est hors d’usage. Châssis écrasé. Caisse morte. Les mots tombent comme autant de couperets. A l’emplacement des pédales, il n’y a plus que quelques centimètres de largeur. En bas, sur le plancher, l’arceau de sécurité a été sectionné d’un coup. C’est lui et la ceinture qui m’ont sans doute sauvé…

Un homme que je n’ai pas vu arriver me pose des questions sur mon passeport. C’est le sergent du village, visiblement sorti d’un profond sommeil. Il n’a pas dû reconnaître tout de suite la voiture qu’il a vue ce matin même sur son poste de télévision. « Oui, nous venons du Cap. Non, nous ne roulions pas à droite. Oui, nous allons — plus exactement, nous pensons — faire le tour du monde, avec ce… véhicule… Enfin, auparavant, nous allons le réparer, bien sûr… »

Il me regarde d’un drôle d’air, pose des questions, encore des questions, sans jamais se lasser. J’ai du mal à l’écouter, à me concentrer et pense plutôt à Paris, à toute cette équipe qui a préparé l’expédition et à laquelle il va falloir « annoncer la nouvelle ». Que vont-ils dire, que va-t-on faire, avec quoi va-t-on rouler ? Tout cela ne va-t-il pas retarder la prochaine émission ?

Six cents coups de marteau plus tard, le véhicule est « sur pied »… Un vrai travail de professionnel ! Jean-Pierre se met au volant… tout au moins ce qu’il en reste… et le convoi des « éclopés » s’ébranle à très faible allure en direction de Lainsburg, le plus proche village.

Il est vingt-deux heures. Le petit hôpital est calme. Couloirs déserts. Lumières tamisées. On me fait asseoir sur une chaise, tandis que Benoît se faufile dans la salle de soins avec sa caméra sous le bras. Il filme d’abord, demande l’autorisation ensuite.

  • Alors, Didier, fini le Raid ?
  • Mais non, il nous en faut plus!…

Je crâne, mais j’avoue que cette « ouverture de programme » n’est pas très réussie. Les infirmières s’activent autour de moi et pansent les nombreuses plaies : morceaux de peau arrachés en profondeur près de l’épaule, blessures aux jambes, genoux, bassin, poignets.

Benoît et Gauthier m’abandonnent à mon triste sort pour aller prévenir… Paris, pendant que les infirmières m’allongent pour me désinfecter et m’administrer une piqûre antitétanique. La jolie blonde m’enfonce l’aiguille au moment où Benoît rouvre la porte

  • J’ai une bonne nouvelle à t’annoncer !
  • Ah bon ?
  • Les filles de Télé-Monte-Carlo ont fait trois tonneaux ! Je sursaute et hurle en me redressant :
  • Quoi ?

L’infirmière, énervée, me recouche de force sur mon brancard.

  • Mais, ce n’est pas possible ! Elles sont blessées ?
  • Non, heureusement, elles n’ont rien, mais la voiture est morte !
  • Ce n’est pas vrai… Ce n’est pas vrai… C’est la journée !

Le docteur, les assistantes nous regardent sans dire un mot. Je leur explique ce qui se passe. Ils doivent se demander quel est ce cirque ambulant et, surtout, quelle télévision est assez folle pour organiser pareil jeu de massacre !

Christine Demont et Guilène Merland sont parties quelques heures avant nous, dans l’espoir de tourner leur premier sujet au nord du pays. Dans leur voiture, l’ambiance est plutôt bonne. Larges sourires et confiance absolue : « Les garçons n’ont qu’à bien se tenir. On va leur montrer ce qu’on sait faire ! »

Le scénario ressemble étrangement au nôtre : une route belle et droite, le fond de l’air qui — paraît-il — est frais, enfin le soleil sur les cheveux blonds de Guilène la nostalgique disant à Christine : « Voir Bloemfontein et mourir!… » Il y a même cette voiture « qui arrive en face, roulant presque au milieu, à la limite de la ligne blanche ». A cet endroit, la route est étroite, bordée de parapets en pierre.

Et puis, comble de malchance, un chien traverse la route — sans regarder ! —sous les pneus des Monégasques. Christine veut l’éviter, serre à gauche; le véhicule passe mais la roue arrière gauche heurte le parapet et crève. La voiture, déstabilisée, entame une course folle en zigzags. Christine braque, contrebraque tandis que Guilène, troublée dans la rédaction de son carnet de bord, lui demande ce qu’elle est en train de faire. Christine, très optimiste, croit encore pouvoir rattraper l’engin. L’équipage se sent partir. C’est le premier tonneau. Tout tourne et se déchire autour d’elles. Les objets volent, la tôle se plie, le verre se brise, dans un bruit assez désagréable à entendre. Suivent un deuxième puis un troisième tonneau avant l’arrêt définitif. A aucun moment, les filles, solidement attachées à leurs ceintures, n’ont eu peur. Le silence succède au tonnerre.

Guilène et Christine sortent par le pare-brise, la première disant

  • « Nous sommes vivantes » ; la seconde concluant, un peu amère : « La course est finie… »

En regardant leur voiture devenue méconnaissable, défoncée de l’avant à l’arrière, raccourcie de haut en bas, les « cascadeuses » se disent qu’elles ont eu beaucoup de chance. Elles ont été sauvées par les arceaux et les ceintures de sécurité.

Le moteur est hors d’usage, les portes arrachées, le hayon arrière cassé, le châssis déplacé, la caisse morte ! Les malles du toit ont explosé en un feu d’artifice de soutiens-gorge et de crèmes antimoustiques, de chaussettes et de cartouches de gaz. Huit mois de provisions éparpillées sur un rayon de trois cents mètres !

Christine a du mal à réaliser et charge toutes les affaires dans le van de la police qui vient d’arriver. Elle le trouve plus spacieux, mais il n’est pas envisageable de poursuivre le Raid avec ce véhicule ! Alors que le soleil se couche sur cette vision apocalyptique, un policier très « british » offre une tasse de thé à Christine, tandis que le candidat suisse Alexandre Bochatay arrive juste à temps — comme par hasard —pour la recevoir dans ses bras. Elle pleure longuement, persuadée qu’elles vont retourner à Paris dans la demi-heure ; persuadée que le Raid n’aura duré que l’espace d’une étape.

Il est minuit. Nous sortons de l’hôpital. Petit à petit, la douleur irrigue mes veines et se répand dans tout le corps. L’enseigne rouge du

« Grand Hotel » clignote et découpe cruellement la silhouette du patron venu nous accueillir sur le pas de la porte. Nous avalons un repas chaud et un coca glacé. Accoudés au bar, Gauthier et moi buvons sans vraiment parler. Le coca est bon. Il passe bien. Je crois qu’il n’est jamais aussi bien passé …

Dans notre petite chambre, Jean-Pierre, Gauthier, Benoît et moi avons organisé une réunion au sommet. Plusieurs questions nous préoccupent : comment récupérer une nouvelle voiture, comment rejoindre l’équipage de Télé-Monte-Carlo, que faire du matériel et surtout, comment rattraper le retard considérable que nous avons pris dès ce soir ?

A Paris, la journée du 13 novembre s’annonçait bien. Elle marquait un véritable tournant dans la vie de l’équipe qui avait élaboré, préparé, organisé le Raid depuis un an et demi, n’épargnant aucun effort, annulant moult week-ends, déplaçant des vacances, sacrifiant la famille et bien des heures de repos. Une équipe entièrement tournée vers un projet monté de toutes pièces, dont les multiples défis leur avaient donné un vertige insurmontable.

Ce matin, Pierre Godde, un des trois « pisteurs » chargés de baliser le terrain, est parti chercher son visa à l’ambassade d’Arabie Saoudite. Malgré son air sérieux, ses cheveux bouclés et ses lunettes qui lui donnent un air d’éternel étudiant, il semble avoir perdu la confiance d’Allah et s’entend dire :

  • Monsieur Godde, nous sommes désolés… Votre venue dans notre pays n’est plus possible…
  • Ah bon, et… pourquoi ?
  • Pour des raisons… techniques…

Pierre est déçu, terriblement déçu. Il rentre à Télé-Union (Société privée qui a produit « LA COURSE AUTOUR DU MONDE » et « LA CHASSE AUX TRÉSORS ») en rasant les murs. Dans son bureau, le directeur de production, Jean-Hugues Noël, parle moins vite que d’habitude. En face de lui, Jacques Antoine, l’inventeur de la course et de la chasse, fume sa pipe sans la mordre et Maurice Cazeneuve, P.-D.G. de la société, reste assis dans son fauteuil. La machine est enfin lancée sur les rails : le trio s’en félicite. Il rigole, se congratule, envisage des horizons sereins.

Bien sûr, tout n’est pas fini : il reste beaucoup de traversées à négocier, de gouvernements à convaincre, d’obstacles à franchir ; mais pourquoi s’inquiéter alors que tout a si bien commencé ?

A ce moment précis, Pierre Godde ouvre la porte et crie

  • Champagne pour tout le monde ! Je viens de me faire sortir de l’ambassade d’Arabie Saoudite !…

La phrase jette un froid. A peine est-elle terminée que le téléphone sonne. Jean-Hugues décroche, écoute. Tout le monde se tait. Lentement, il devient pâle ; glisse sur son fauteuil… Maurice Cazeneuve et Jacques Antoine le fixent sans rien dire. Une lueur d’inquiétude s’échappe de leurs regards. Jean-Hugues, livide, raccroche en disant :

  • Les filles se sont plantées ; dans un petit village, en Afrique du Sud ! Je n’ai pas plus de détails… Elles rappelleront…

C’est l’étonnement, l’accablement. La température a baissé de quelques degrés. L’euphorie est vite retombée.

Aussitôt, l’équipe se réunit pour envisager des solutions de secours. Dans son bureau voisin, Claude Hardy, l’homme qui a négocié avec Citroën, fixe sans rien dire son téléphone. Il réfléchit, la moustache en arrêt. En général, il ne s’extériorise pas. D’un geste lent et sûr, il saisit le combiné, appelle Citroën, les compagnies d’assurances et les compagnies aériennes. De sa voix calme et grave, il se lance alors dans une fantastique course contre la montre.

De leur côté, Pierre Godde et Pierre Balian, un autre avant-courrier, se sont enfermés dans la grande pièce tapissée de cartes. Ils « plan­chent » devant les masses jaunes de la péninsule Arabique et se demandent comment la traverser autrement que par l’Arabie Saoudite.

  • Et si on essayait le Yémen du Sud ou bien l’U.R.S.S. ; plus au nord ?

L’ambiance n’est plus au beau fixe. Il ne reste qu’une maigre consolation aux producteurs dépités : aller ce soir à ce cocktail prévu pour fêter l’inauguration de l’Hippopotames-Citroën, sur les Champs­Elysées.

Toute l’équipe s’y rend, sauf les deux avant-courriers, privés de désert. Une nouvelle fois, le téléphone sonne. Pierre Godde décroche, entend une voix faible, presque éteinte celle du caméraman Benoît Jacques.

  • Salut, Pierre… Tu sais, nous avons eu un accident de voiture… Pierre se félicite déjà que l’information circule aussi vite sur le terrain. Sûr de lui, il répond
  • Oui, oui, je sais…

Benoît, de son côté, s’étonne que les nouvelles aillent aussi vite

  • Comment, tu sais ?
  • Tu as des nouvelles des filles ?
  • Quoi… Qu’ont-elles, les filles ?..

Le quiproquo ne dure pas plus longtemps. Pierre Balian enfile son manteau et descend sur les Champs-Elysées. Il y a bien eu un deuxième accident ! La foule qui se serre sous les lustres dorés du restaurant l’empêche d’aller vite. Pierre se faufile entre les coupes de champagne et les petits fours, bouscule un directeur, salue un P.-D.G., trouve enfin Jean-Hugues Noël entre deux robes longues et lui lance sans prendre de gants :

  • Didier et Benoît se sont plantés !

C’est la consternation sous les lampions. Pour un départ, c’est un départ ! Georges Falconnet, directeur commercial chez Citroën, se fait rassurant :

  • Les ennuis, vous les avez eus tout de suite. Vous n’en aurez plus !

Et il demande aussitôt à Pierre Miranda, le directeur de la communication, d’en préparer trois autres. La soirée tourne court. Les producteurs s’interrogent. Roger Bourgeon, Jacques Antoine, au bord des larmes, se demandent où va l’émission. Les accidents, bien sûr, tout le monde y a pensé. Mais pas si vite, pas si tôt ! Il serait plus sain de les répartir au long des huit mois car, après tout, nous n’en sommes qu’au dixième jour !

Pierre Godde, triste, boucle sa valise et part à Pékin négocier le passage du Raid.

A deux heures du matin, Claude Hardy remonte les Champs­-Elysées. Il a l’impression que tout vacille sous ses pieds.

« C’est la première étape, pense-t-il, ils n’arriveront pas jusqu’au bout. Le Raid va tomber à l’eau… »

Seul, il s’attable dans un petit restaurant et pleure.

A Lainsburg, nous avons éteint la lumière vers trois heures du matin. Ma jambe me fait mal. Dans l’obscurité silencieuse, je m’abandonne au jeu cruel de la mémoire qui fait danser mille visages amis.

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Didier Regnier

Didier a encadré la caravane du Grand Raid du Cap de Bonne Espérance à la Terre de Feu, animant l'émission sur le terrain et réalisant des récits étape pour présenter les pays traversés et illustrer les aventures et anecdotes de la semaine. Ses articles sur ce site sont des extraits du livre qu'il a publié en 1985 chez Robert Laffont, "L'Aventure du Grand Raid".