Shaoshan, là où naquit Mao Tsé-toung

Jeudi, 27 février.

Le ciel est toujours bas et gris. La route ressemble aux autres, mais elle porte le poids de l’histoire et le sens mystérieux que lui donne l’émotion. Nous roulons vers le village de Shaoshan, là où naquit, en 1893, Mao Tsé-toung. Les ruelles sont propres, les maisons y sont plus léchées qu’ailleurs, le cadre a été arrangé pour l’œil révérencieux des enfants du Timonier. Dans une petite salle d’école, le guide s’empresse de me montrer le banc sur lequel Mao suivit ses premières classes et un peu plus loin un gigantesque musée dans la cour duquel de jeunes fiancés se font photographier.

La maison natale de Mao

Tout au long des couloirs où l’air s’engouffre en gelant les gardiens emmitouflés, s’étale la carrière de Mao à travers des portraits, des reconstitutions et des photographies. La fondation du parti, les sociétés paysannes, la Longue Marche des communistes vers le nord de la Chine pendant un an, le discours du 1″ octobre 1949, lorsque Mao proclame La république populaire de Chine du haut de la tribune de Tien-An-Men à Pékin. Les salles sont presque désertes, traversées de rares pèlerins qui expliquent à leurs bambins au nez rouge le chemin accompli.

Un peu plus loin, j’entre dans la demeure où est né Mao, une petite maison toute simple aux pièces humides. Tout est encore en place : la cuisine avec les fours et les marmites prêts à servir, la salle de séjour, la chambre de Mao avec son lit. Dehors sur les bords de la mare où il aimait se baigner, le photographe lit son journal, à côté de son appareil monté sur un trépied. Il doit attendre avec impatience le retour des beaux jours et l’éclosion des lotus pour fixer à jamais les sourires reconnaissants des héritiers de Mao, lui qui avait écrit ici : « Ce que j’aimais, c’était les rumeurs de la vieille Chine et surtout les histoires de révolte… »

 

Un peu plus haut, les gardiens se sont attroupés autour de notre voiture. Ils posent des questions, semblent étonnés par notre aventure, ouvrent les portières, soulèvent le capot. Le plus jeune me demande de s’asseoir au volant. Ses yeux courent sur le tableau de bord, les rétroviseurs, le levier de vitesse. Il est muet d’admiration. Cette voiture, ce garde rouge devant la maison de Mao sont pour moi une image extraordinaire, insolite, qui résume plus que toute autre les imprévisions du temps, les aléas de l’histoire et les mystérieux raccourcis de la politique.

La visite du lieu de naissance de Mao aujourd’hui:

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Didier Regnier

Didier a encadré la caravane du Grand Raid du Cap de Bonne Espérance à la Terre de Feu, animant l'émission sur le terrain et réalisant des récits étape pour présenter les pays traversés et illustrer les aventures et anecdotes de la semaine. Ses articles sur ce site sont des extraits du livre qu'il a publié en 1985 chez Robert Laffont, "L'Aventure du Grand Raid".